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31/3/2021
Pâques, un chemin vers la lumière
L'abbé Roland Cazalis est aumônier au Foyer Saint-François à Namur. Ce centre accueille des patients atteints d’une maladie grave, ayant épuisé toutes les possibilités de guérison et dont l’état nécessite des soins palliatifs et un environnement adapté. Parallèlement, un service d’accompagnement propose aux proches endeuillés un lieu pour être écoutés et un temps pour exprimer leur souffrance. En ce temps pascal, l'abbé Cazalis livre une réflexion, en parlant de la réaction de l'apôtre Jean à la découverte du tombeau vide... et en faisant le lien avec la pandémie actuelle.
Dans les récits bibliques, il arrive que Dieu prenne l’initiative de sortir le peuple d’un lieu d’enfermement en lui ouvrant un chemin tout en respectant le rythme de l’histoire. Chaque traversée est un tournant, non seulement dans la trajectoire du peuple, mais aussi dans sa création. Ces événements vécus à l’échelle d’un peuple permettent de comprendre le mouvement dans lequel toute l’humanité est entraînée dans l’ouverture de l’histoire qu’opère la pâque du Christ. Toute personne qui accepte de l’accompagner parvient à la lumière. Le disciple peut vivre cette expérience de salut à n’importe quelle étape de sa vie.

L’évangile de cette année met en scène cette expérience de salut vécue par l’apôtre Jean dans le récit du tombeau vide (Jn 20, 1-10). La scène est singulière. Le lieu qui devait abriter un corps est vide. Les linges et le suaire témoignent de cette absence. C’est le choc! Le puzzle de faits, de paroles, de signes, de silences, est instantanément ordonné. Une lumière envahit son âme et ne le quittera plus. Jean vient de franchir le passage avec celui qui est le Vivant. Voilà la grâce de sa vie. C’est un clin d’œil du Christ pour lui manifester son affection. Il le reçoit comme tel.
Sans doute qu’avant cet événement, Jean était dans la perplexité et la désolation. En quelques heures, le monde autour de lui a complètement changé en s’obscurcissant. Le Messie vers qui accourait le peuple à cause de sa grande compassion lui a été enlevé. Qui prendra soin de lui maintenant? Les paroles de grâce et de vérité qui sortaient de sa bouche et nourrissaient la foule se sont tues. Qui lui donnera désormais ce précieux pain?

La période de pandémie que nous vivons peut nous mettre en phase avec l’état d’esprit de Jean avant l’événement du tombeau vide. En effet, notre monde est brusquement entré dans une phase paradoxale qui dure encore.
Cette improbable situation est propice à l’incompréhension, la désolation, la colère et même à quelques dérapages.
Jean ignorait que, pendant qu’il se morfondait dans sa peine, Dieu travaillait au cœur du manque pour re-susciter le Vivant. Tandis qu’il cherchait à comprendre pourquoi le temps s’était subitement arrêté, Dieu travaillait au relèvement du monde. Il en est de même pour notre monde d’aujourd’hui. Dieu travaille au cœur de nos privations sous toutes leurs formes pour nous redonner notre andante. Nous en avons déjà les prémisses.
Elles prennent inter alia la forme de la créativité tous azimuts et l’expérience acquise. Elles se manifestent encore par les mille initiatives et gestes de solidarité. Le ministère de la compassion exercé par les soignants et tous ceux qui se soucient des autres nous rappelle sans cesse la dignité humaine et le prix que nous sommes disposés à y mettre pour la sauver. La biomédecine a réussi à mettre au point des vaccins fonctionnels en moins d’une année à partir d’un puzzle d’idées, de travaux de recherche, qui ont trouvé là leur point de nucléation. Nous avons acquis une expérience humaine et un savoir-faire qui auront des répercussions non seulement pour faire face aux pandémies, mais également dans toute la vie sociale. De même, l’humanité entière a été confrontée en même temps à la même adversité. Nous sommes tous dans une dynamique du provisoire, en attendant de renouer avec notre allant. Cette expérience commune est susceptible de renforcer la conscience d’espèce et par conséquent de renforcer la bienveillance mutuelle.

L’événement « Pâques » qui a permis à Jean de nouer la vie d’avant avec celle d’après est le clin d’œil du Christ. En réalité, ce dernier engendre la vie d’après ou le présent permanent qui est l’état de vie du disciple dont le regard du Christ a atteint tous les recoins de son être. Jean témoigne de la transformation de son propre regard lui permettant d’embrasser toute l’histoire de la création bien avant le commencement du monde. Son Prologue (Jn 1, 1-118) en fait la synthèse.

En somme, que recueillons-nous de l’événement Pâques à travers la trajectoire de Jean ? Nous sommes faits pour l’altérité. Cette caractéristique se décline des relations humaines jusqu’à la relation avec le Vivant. Il ne s’agit pas de n’importe quelle relation, mais de celle qui contribue à notre croissance. Le temps de confinement est éprouvant, car il porte atteinte à cette dimension. Néanmoins, ce temps nous rappelle comme il est précieux d’être consolidé intérieurement, par exemple, en apprenant aussi à vivre avec soi-même. À partir de là, tout devient parole et la relation avec autrui trouve sa pleine mesure. Ainsi, un simple regard suffit à nourrir l’âme.

La relation à Dieu obéit sensiblement aux mêmes modalités. Saint Augustin exprime la notion d’altérité et de sa dynamique dans ses Confessions sous forme d’un credo. « Tu nous as fait pour toi, Seigneur, et notre cœur est sans repos, tant qu’il ne demeure en toi ». Il n’y a là, aucune idée de prise de possession de l’autre, ni de privation de la liberté de choix dans l’orientation de sa vie. Dieu est libre et nous sommes libres. La formule d’Augustin ne fait que rappeler l’origine du don et la dynamique de la relation. Nous pourrions sans nous tromper soutenir que cette confidence traduit également l’expérience de Jean dont le Prologue est le credo.

Pour entrer pleinement dans l’Action de grâce avec Jean et Augustin, nous avons besoin que la promesse de Pâques se déploie dans notre présent. Que s’ouvre pleinement le chemin de la vie, que tombent les murs du confinement, et qu’un clair regard nous console. Tel est le sens de notre quête et telle est la prière qui murmure en nous. Oui, l’humanité est une espèce orante. Le désir est la parole que nous adressons à Dieu afin que des possibles s’ouvrent dans notre existence. Pâques est en marche. Le jour se lève et plusieurs chemins s’ouvrent devant nous. Notre marche deviendra vraiment allègre si l’Esprit, lui qui vient sans crier gare, nous réjouit de sa présence.

Abbé Roland Cazalis
Aumônier au Foyer Saint-François à Namur
foyersaintfrançois@uclouvain.be
www.foyersaint-francois.be
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