Jeunes Vie du Diocèse Formations Agenda

 Retour à la liste
29/8/2011
75 ANS DE VIE RELIGIEUSE
Soeur Anne-Marie: ''Je suis heureuse, j'ai persévéré dans ma vocation''
Soeur Anne-Marie a posé sur ses genoux, aiguilles et pelote de laine. Au fil des rangs du tricot, un minuscule bonnet en laine beige prend forme. Ce bonnet comme des milliers d'autres sera utilisé par Entraide et Fraternité lors d'une prochaine campagne de sensibilisation à la pauvreté. ''Je n'aurais jamais pensé ça!'' lance tout de go la religieuse. Soeur Anne-Marie qui vient de souffler les 98 bougies de son gâteau d'anniversaire se prépare à un autre jubilaire. Ce mercredi, jour de la fête de Marie-Médiatrice, marquera ses 75 ans de vie religieuse comme Assistante du Sacerdoce, un ordre religieux qui a aujourd'hui disparu et dont la maison mère se trouvait à Resteigne. Soeur Anne-Marie plonge dans sa mémoire -excellente- et parle de sa vie avec un plaisir évident. Ses yeux brillent de malice.
''Nous nous levions chaque matin à 5 heures. La journée démarrait par un temps de méditation, puis de prière. De 9h à 11h, nous devions travailler en silence. Ça c'était un peu dur, ajoute la religieuse. C'était d'ailleurs souvent le moment où nous avions des fous rires!'' Et comme pour montrer qu'elle n'a rien perdu de sa bonne humeur, soeur Anne-Marie éclate de rire. Reconnu en 1936 par Mgr Heylen alors évêque de Namur, l'ordre des Assistantes du Sacerdoce a aujourd'hui disparu. Ces religieuses étaient au service des prêtres. Elles s'occupaient de l'intendance. A Resteigne, des prêtres venaient encore pour prendre un peu de repos, pour un temps de convalescence....
Cet ordre existait bien avant la reconnaissance officielle. Entrée à Resteigne alors qu'elle avait 17 ans, la jeune femme a prononcé des voeux privés trois années plus tard. Des voeux renouvelés lors de la reconnaissance épiscopale.
Soeur Anne-Marie et soeur Monique sont les deux dernières Assistantes du Sacerdoce encore en vie. Elles ont passé de longues années au palais épiscopal de Namur. Soeur Monique était au service de Mgr Léonard alors évêque de Namur. Soeur Anne-Marie l'aidait pour, par exemple, éplucher les légumes. A l'arrivée de Mgr Vancottem, soeur Monique a préféré renoncer à cette mission. L'âge aidant, ce travail était devenu trop lourd à porter. Avec soeur Anne-Marie, elle vit dans un appartement, à Namur.

''J'avais 17 ans''
Soeur Anne-Marie avait donc 17 ans lorsqu'elle a décidé de devenir religieuse. Une décision qui a plutôt surpris son entourage: la jeune fille était en troisième année à l'école normale de Pesche et se destinait à devenir institutrice. ''Cela n'arriverait plus aujourd'hui: jamais une congrégation n'accepterait de prendre une aussi jeune fille. Je n'ai jamais regretté ma décision mais lorsque je suis devenue religieuse je ne connaissais rien de la vie.'' Lorsqu'elle est entrée dans cet ordre, il s'agissait de porter l'habit: une longue robe noire très simple, une fine ceinture et un col similaire au col romain des prêtres. Sans oublier le voile, court pour le travail et long pour les sorties. Dans les années 60, le port de cet habit n'est plus obligatoire. Soeur Anne-Marie laisse la longue robe noire dans la garde robe pour la chasuble bleue... Une tenue bien plus pratique pour la vie de tous les jours. Elle a gardé le voile noire marqué d'un fin liseret noir.

Repriser et encore repriser
La jubilaire aime parler de ses journées de travail, des journées bien remplies: ''Après le repas, une fois la vaisselle terminée, nous avions un moment de repos pour lire, nous promener ou réparer notre propre linge. Il n'était pas question de prendre sur notre temps de travail pour le faire.'' L'entretien du linge des prêtres prenait beaucoup de temps. Les Assistantes du Sacerdoce accordaient encore un soin tout particulier à l'entretien du linge d'église. ''Je ne m'en suis jamais occupé. J'étais fascinée de voir comment mes consoeurs étaient soigneuses, méticuleuses pour repasser les dentelles des aubes. Moi, j'en ai reprisé des longs bas en laine noire et des chaussettes. Nous commencions par les trous les plus importants, c'était notre manière de garder le moral!'' Pendant la guerre, les Bénédictins de Clervaux ont été chassés de chez eux. Ils sont finalement arrivés à Chanly où ils ont vécu. ''J'y étais avec une autre religieuse raconte soeur Anne-Marie. Nous faisions la cuisine. Il s'agissait aussi de nettoyer les soutanes des Bénédictins sans oublier les scapulaires et avec la capuche... c'était quelque chose.'' La religieuse a rarement quitté son Ardenne natale. Soeur Anne-Marie est allée, une fois, en pèlerinage à Lourdes: sa seule infidélité à la Belgique.

Battre sa coulpe
La vie de soeur Anne-Marie est -heureusement- aujourd'hui bien plus paisible. Ses journées démarrent toujours tôt avec la messe à 7h15. Mgr Warin évêque auxiliaire de Namur vient, en voisin, la célébrer chez les religieuses. Le dimanche, bras dessus, bras dessous, les deux soeurs participent à l'office, à la chapelle des jésuites. Chaque jour encore, elle prie pour les vocations sacerdotales tandis qu'elle confie encore les malades à saint Joseph. Pas une journée non plus sans que cette soeur au regard si pétillant ne récite son chapelet. Elle a par contre abandonné une tradition de son ordre. ''Dans les premières années, il fallait aussi battre sa coulpe. Chaque soir, après la prière, chacune devait dire si elle avait eu, et le nombre de fois, des paroles désagréables envers des consoeurs, si elle avait critiqué l'autorité, si elle avait fait des reproches à une consoeur ou encore si elle s'était plainte... Est-ce que j'ai été sincère tous les soirs, s'interroge soeur Anne-Marie, je n'en sais rien. Certains jours, j'ai sans doute bien oublié l'une ou l'autre chose...''
Mercredi, jour de la fête de Marie Médiatrice, elle renouvellera, avec soeur Monique, ses voeux. C'est comme ça chaque 31 août le jour de la fête de la sainte patronne des deux religieuses. Même si elle avoue ne pas accorder une grande importance à ses 75 années de vie religieuse elle en retire une satisfaction certaine: ''Je suis heureuse, lance la jubilaire, j'ai persévéré dans ma vocation.''
Christine Bolinne


Translate in English - Nederlands - Deutsch