Ce jour-là, le ciel est bien gris au-dessus de l'abbaye de Rochefort, un lieu baigné de sérénité. Le soleil est lui sur les visages des ordinands, ils sont tout simplement rayonnants. Frère Michel qui lutte contre la grippe ne participera pas à la discussion, il ne rejoindra le groupe que pour la photo.
C'est la première fois que les ordinands se retrouvent, entre eux, pour une retraite avant l'ordination. Chacun est ravi. Cette année plus encore cette retraite se justifie pleinement. Tous les ordinands ne se connaissaient pas. Ainsi Frère Michel et Frère Frédéric appartiennent à la Fraternité de Tibériade. Le premier vient de rentrer de Lituanie où il est moine missionnaire. Ils se sont formés en dehors de notre diocèse. Trois ordinands font partie du chemin néocatéchuménal et les deux derniers, originaires du diocèse, se sont formés au Séminaire Notre-Dame de Namur. Hormis Frère Michel qui va retourner poursuivre sa mission en Lituanie, tous exerceront leur ministère dans le diocèse de Namur. Réginaldo Lugarezi: ''En voyant les parcours différents qui sont les nôtres, j'ai pu constater la richesse de l'Eglise.'' Cette retraite était prêchée par le chanoine Eric Fallas. En tant que cérémoniaire, ce dernier sera à leurs côtés le jour de l'ordination. il veillera au bon déroulement de la célébration. Comme il le rappellera à plusieurs reprises tout au long de la semaine: ''Pensez à vous, je m'occupe du reste.''
Et cette retraite a été unanimement appréciée. Frère Frédéric Simonis: ''Cette retraite était fondamentale pour préparer notre coeur à l'ordination. Nous avons eu du temps pour nous pencher sur la Parole de Dieu et prier ensemble.'' ''Cette retraite était vraiment la bienvenue ponctue Claudio Fabian Diaz Gomez. Moi, j'étais plongé dans les préparatifs et j'avais bien besoin de cette retraite pour m'en détacher et réfléchir à ce qui va arriver. Ce risque de se faire rattraper par l'activisme est permanent on en oublie l'essentiel, la prière.''

''Abaisser son orgueil''
Tous viennent de passer plusieurs années dans un séminaire, à se former. Ils ont découvert, pour la plupart, grâce à l'insertion pastorale la vie en paroisse. Une fois ordonné, chacun sera affecté dans une paroisse et pourra exercer son ministère. Comment s'y préparent-ils?
Pierre Dujardin: ''Mon ministère qu'importe l'endroit où je serai - je préfère ne pas y penser encore - je le conçois comme une manière de rendre le Christ présent dans le monde. Pour mon faire-part d'ordination, j'ai choisi de saint Matthieu ''Et moi, je suis avec vous jusqu'à la fin des temps.'' Cette présence passe bien sûr par l'Eucharistie, très importante mais ce n'est pas tout. Il y a aussi la Parole donnée. Et puis, je veux être proche des gens.'' Claudio Fabian Diaz Gomez: ''Nous avons une préparation de sept années pour devenir prêtre, c'est long. C'est aussi le temps pour que les passions du début s'atténuent. C'est encore le temps d'abaisser son orgueil pour mettre en première place le Christ à suivre.'' Le Frère Frédéric voit lui le sacerdoce comme une manière d'être plus près de la croix du Christ. ''J'ai toujours eu la vocation d'être religieux. Je suis un petit moine. Dans quelques jours, je serai un frère-prêtre et pour moi, c'est important.''
Une nouvelle vie, un nouveau départ cela peut entraîner un certain stress. Franck Toffoun ne veut pas laisser de place à la peur: ''Le Christ ne nous demande pas de le devancer mais bien d'être derrière lui. L'Esprit Saint nous conduira.'' Pierre Dujardin conçoit lui son ministère comme un défi, un beau défi à relever. ''J'aimerais arriver à réveiller en chacun sa vocation baptismale. Le pape François nous encourage à aller vers ceux qui sont loin de l'Eglise pour leur parler de la joie de l'Evangile.'' Originaire du Paraguay, Claudio Fabian Diaz Gomez connaît la manière dont la religion est vécue dans son pays, il peut comparer avec ce qui se vit, ici, en Belgique. ''La réalité belge nous pousse en dehors de nos sacristies. Nous ne pouvons pas être là que pour donner les sacrements. Nous devons aller vers les brebis perdues. Il faut sortir. Aller vers les gens qui ont besoin de sentir que l'Eglise pense à eux.'' Giovanni Sannino ajoutera simplement: ''Le Christ m'a personnellement sauvé. Si dans une paroisse, une personne peut être sauvée en découvrant le Christ, je saurai que c'est énorme.''

''Nous ne serons pas seuls''
Le ministère n'est pas tous les jours simple à vivre. Et il arrive qu'une fois la porte du presbytère refermée la solitude devienne pesante. Les ordinands ont déjà bien réfléchi à ce point et se veulent optimistes. Giovanni comme Claudio ou encore Reginaldo appartiennent au chemin néocatéchuménal. ''La communauté de frères laïcs est présente pour partager les temps de prière, la parole de Dieu, les soucis et la grâce de redécouvrir notre baptême.'' Franck Toffoun ne perçoit pas la solitude négativement: ''Elle n'est pas mauvaise en soi, elle permet d'être en lien avec le Père mais j'espère aussi, en paroisse, vivre pleinement la communion avec les paroissiens.'' Pierre Dujardin comptant lui sur la bonne ambiance entre les prêtres d'un secteur, d'un doyenné pour se soutenir, pour le soutenir.

Le 29 juin, dimanche de l'ordination
Quand on aborde avec les futurs prêtres le jour de l'ordination on perçoit une certaine fébrilité. Frère Frédéric, plus rayonnant que jamais: ''Je veux vivre, avec le coeur, ce moment. Je sais que, tout au long de ma vie, je m'appuierai sur ce sacrement de l'ordre que je vais recevoir. Maman m'a souvent dit qu'elle s'était appuyée sur le sacrement de mariage lorsque les choses devenaient plus compliquées.'' Giovanni Sannino voit, en ce dimanche, une fête pour toute l'Eglise avant d'être une fête personnelle. ''Je pense aussi à l'évêque et à sa joie de disposer de nouveaux pasteurs pour s'occuper des brebis.'' Reginaldo aura le mot de la fin: ''Une ordination, c'est un nouveau prêtre qui vient de naître.''
C.B.
Photos: A.S.