Massées sur la place Saint-Pierre ou encore confortablement installées devant leur écran de télévision, ce sont des centaines de milliers de personnes qui ont assisté, depuis Rome, à la canonisation du Père Damien. Monseigneur Léonard, évêque de Namur et Monseigneur Warin, évêque auxiliaire de Namur faisaient partie de la délégation belge. Alors que la basilique de Koekelberg se prépare à une célébration d'hommage dédiée à l'apôtre des lépreux, ce sera ce dimanche 18 octobre, ils racontent comment ils ont vécu ce grand moment pour tous les chrétiens.

Rome et plus particulièrement la Cité du Vatican ont vécu, durant plusieurs jours, dans l'ambiance de ces cinq canonisations. Ce sont des représentants du monde entier qui étaient présents à Rome. Beaucoup d'ailleurs ont découvert notre petit pays à travers justement le récit de vie du Père Damien.
Mgr Léonard, sur place, a ressenti de la fierté: "J'ai d'abord été touché par la réception du samedi soir à l'Ambassade Belgique auprès du Saint-Siège, en présence du Roi et de la Reine et de plusieurs personnalités politiques. Une certaine fierté d'être belge - pas très fréquente dans notre pays - se dégageait de cette rencontre. Et il y avait de quoi, car la figure du Père Damien est universellement connue et force l'admiration internationale. J'ai été reconnaissant à nos responsables politiques de signifier officiellement la gratitude du pays à l'égard d'un héros national. Nous sommes habitués à ce que de hautes personnalités politiques honorent de leur présence et de leurs encouragements des exploits sportifs. Qu'on l'ait fait aussi pour un champion de l'amour fraternel à l'égard des plus pauvres est tout à l'honneur de nos dirigeants. J'ai donc vécu cette canonisation avec un vif sentiment de gratitude et de fierté. Et le fait que Jeanne Jugan, fondatrice des Petites Soeurs des Pauvres, ait été canonisée en même temps que le Père Damien m'a paru un formidable stimulant pour nous pousser à nous oublier nous-mêmes pour autrui."
LE PAPE ET LA POLITIQUE BELGE
Le Pape ne doit rien ignorer des tensions linguistiques qui régulièrement secouent notre pays... "Tout le monde a remarqué comment notre Pape Benoît XVI, après avoir célébré les mérites de Damien, né en terre flamande, a rappelé qu'avait été canonisé, il y a 20 ans, un autre saint belge, le Frère Mutien de Malonne, explique l'évêque de Namur. Le rapprochement de ces deux personnalités très différentes m'a semblé très significatif. Un Flamand d'un côté. Un Wallon de l'autre. Avec des tempéraments très contrastés et des missions fort différentes. Et cependant un même amour de Dieu et du prochain, poussé jusqu'à l'héroïsme de part et d'autre. Cela représentait splendidement pour moi la vocation difficile, mais pas impossible, de la Belgique catholique: vivre l'unité d'une même vocation humaine et spirituelle dans la diversité des langues et des traditions. J'ai trouvé d'ailleurs très touchant que, lors des moments de fraternisation, les pèlerins francophones et flamands venaient saluer indifféremment tous les évêques belges, dans n'importe quelle langue, comme les membres d'une seule famille. C'était très beau et, par-delà les tensions politiques, reflétait bien l'âme du profonde du peuple chrétien de notre pays, en sa grande majorité, habituellement silencieuse."
DAMIEN A DONNE SA VIE
Mgr Warin, évêque auxiliaire de Namur est rentré au pays lui aussi heureux de ce qu'il avait vécu. Il est satisfait d'avoir participé à une aussi belle cérémonie. Juste peut-être un petit regret. Mgr Warin reconnaît bien volontiers qu'il a été surpris par la retenue des fidèles présents dans la basilique Saint-Pierre. Il faut dire que les consignes avaient été claires: pas d'applaudissements, pas de bannières. "C'est dommage. J'aurais souhaité que l'assemblée puisse laisser éclater sa joie. Je fais la comparaison avec une ordination: une fois le rite terminé, avec l'accolade de l'évêque, le public donne libre cours à ses applaudissements. Cela m'a manqué que la foule ne puisse pas exprimer ce qu'elle avait sur le coeur. Le lendemain, lors de l'office à Saint Jean du Latran, c'était différent, beaucoup plus spontané."
Mgr Warin voit dans le parcours de cet Apôtre des lépreux celui que tout prêtre mais aussi d'une manière plus large tout chrétien est amené à vivre. "Le Christ est allé jusqu'au bout, il a donné sa vie, son propre sang. Le Père Damien a lui aussi donné sa vie. Quel exemple fantastique. Même quand son supérieur lui disait d'arrêter, il n'a pas obéi et il est resté.
Je ne suis pas resté insensible au parcours de Jeanne Jugan. Quelle femme! Elle a fondé la congrégation des Petites Soeurs des Pauvres avant d'être mise de côté. Elle est allée alors quémander du pain pour les pauvres avant de revenir dans la maison mère. Là, elle a vécu dans l'indifférence totale. Les novices ne savaient même pas que celle qui partageait leur table était la fondatrice! Cette vie me touche profondément. Et je suis fier que les Petites Soeurs des Pauvres de Namur m'aient demandé de présider une eucharistie d'action de grâce à l'occasion de la canonisation de leur fondatrice."
La canonisation, c'était bien sûr dimanche dernier. Mais il n'est pas trop tard pour vous aussi participer aux hommages rendus à ces deux canonisés, chez nous, en Belgique. Des célébrations auront lieu ce week-end (lire par ailleurs).

Christine Bolinne

SUR VOTRE AGENDA
Mgr Warin présidera l'office chez les petites soeurs des pauvres (home Saint Joseph) ce samedi 17 octobre, à 10h. Une eucharistie d'action de grâce à l'occasion de la canonisation de leur fondatrice Soeur Jeanne Jugan.
Mgr Léonard sera présent ce dimanche, à 15h, pour l'eucharistie d'action de grâce présidée par le Cardinal Danneels, avec les évêques de Belgique, les Pères et les Soeurs des S.S.-Coeurs, Tremelo et toutes les communautés chrériennes. De grands écrans seront disposés dans la basilique.