François-Xavier Grandjean était gamin lorsqu'il a découvert l'orgue: un véritable coup de foudre qu'il n'a jamais oublié. Il avait 12 ans et cela se passait à l'église de Bastogne où il venait assister à la messe avec sa grand-mère. L'enfant aimait écouter l'orgue et ce qu'il appréciait par dessus tout, c'était ''l'après célébration''. A Bastogne, l'orgue est installé au rez-de-chaussée. Firmin Decerf a toujours eu l'habitude, une fois la célébration terminée, de se livrer à quelques improvisations accompagnant ainsi la sortie des paroissiens. Le petit François-Xavier n'en perdait pas une miette.
Tout naturellement, il s'inscrit à l'académie de Bastogne et suit les cours dans la classe de Firmin Decerf. Plusieurs fois par semaine, il se précipite à l'église et s'installe face aux claviers. Inlassablement, il joue et joue encore. Cette passion pour la musique et pour l'orgue en particulier est telle qu'après les humanités, il s'inscrit à l'Imep (Institut Supérieur de Musique et de Pédagogie) et y retrouve Firmin Decerf. A la retraite de celui-ci, il terminera son cursus dans la classe de Benoît Mernier.
Durant ses études, François-Xavier Grandjean joue sur l'orgue de l'église Sainte-Julienne, à Salzinnes. De longues heures pour arriver à maîtriser ce drôle d'instrument. Un orgue est imposant. Il est un orchestre à lui tout seul. On dit de lui que c'est le roi des instruments. ''Certains affirment même souligne François-Xavier Grandjean qu'il en est l'empereur! Je suis fasciné par l'orgue qui est à la fois force et douceur, c'est l'instrument des extrêmes.''

Un romantique devenu néo-classique
Devenu organiste titulaire de la paroisse Sainte-Julienne, il a toujours le même plaisir à faire sonner cet instrument d'autant qu'il vient de faire l'objet d'une restauration en profondeur. Ce travail effectué par la firme Delmotte de Tournai aura été long et coûté 160.000€: l'orgue était en très mauvais état. La Ville de Namur est intervenue dans le financement des travaux. La fondation Foi et Vie de Lausanne, des dons privés et l'organisation de concerts ont permis de réunir le restant des fonds.
L'orgue présent dans l'église Sainte-Julienne à Salzinnes est un orgue Walcker: il date de 1907 et avait la particularité de se prêter admirablement bien à un répertoire romantique. Ça c'était avant une première rénovation, en 1962, au cours de laquelle on donne plus d'ampleur à l'instrument lui faisant perdre cette spécificité romantique. ''Grâce à cette nouvelle rénovation, nous avons aujourd'hui un instrument néo-classique ouvert à beaucoup de jeux.'' Lors du concert inaugural de ce dimanche 3 mai, François-Xavier Grandjean a choisi une programmation très diversifiée: ''Elle me permettra de montrer au public toute la palette de l'instrument avec des pièces plus virtuoses que d'autres.'' Jouer de l'orgue demande certes des talents musicaux mais aussi une bonne forme. ''Jouer de l'orgue, souligne François-Xavier Grandjean, c'est physique.'' Le jeu demande, par exemple, une parfaite synchronisation des pieds et des mains. Les mélomanes pourront s'en rendre compte grâce à l'écran géant qui est placé lors de chacun de ces moments musicaux organisés par le Festival d'Orgues de Namur. Une caméra filme le mouvement des pieds et des mains du musicien. Les mélomanes sont non seulement les auditeurs mais aussi les spectateurs privilégiés de ce qui se passe au jubé.

Pas que partenaire de la liturgie
Ce concert comme ceux qui seront programmés dans le cadre du Festival (voir ci dessous) est aussi l'occasion de constater que l'orgue n'est pas fait que pour la liturgie. Bien sûr ses dimensions, imposantes, font qu'il trouve tout naturellement sa place dans les église. L'orgue accompagne ainsi de manière privilégiée les célébrations. ''Pendant les funérailles, j'estime que l'orgue a un rôle social. On n'est pas là comme lors d'un concert. Par les sonorités, par les improvisations, l'organiste arrive à accompagner les familles, les amis. Lors des mariages, je suis toujours un peu déçu quand les couples font le choix d'un CD, je trouve cette solution musicale tellement impersonnelle.''
Il est aussi instrument de concert. ''Un orgue a un côté mystérieux: en façade on ne voit que des tuyaux mais il est bien plus complexe que ça.'' Ce dimanche 3 mai, à partir de 16h, François-Xavier Grandjean lèvera le voile sur cet instrument si mystérieux. Il a choisi de faire voyager le public à travers les oeuvres de Bruhms, de Bach avec cette pièce où alternent fougue et lenteur. Sa programmation est aussi axée sur des pièces de Messiaen et de César Franck.
Les musiciens, avant un concert, déterminent avec beaucoup de rigueur les pièces qu'il vont faire vivre au public. L'organiste y accorde un soin encore plus particulier. Pour lui, c'est l'orgue qui conditionne le programme. ''Chaque orgue est différent et on ne peut pas jouer toutes les oeuvres sur tous les orgues.''
Christine Bolinne

Pour en connaître plus sur la deuxième du Festival d'orgues de Namur, il suffit de surfer sur: wwww.festival-orgues-Namur.be Un festival qui accueillera deux pointures internationales: le 17 mai, Jean Guillou et le 14 juin Lorenzo Ghielmi. Le 31 mai, lors du récital d'Emmanuël Clacens, l'orgue a rendez-vous avec les trompes de chasse de l'ensemble ''The Venery Fantaisy''. Des concerts qui se dérouleront à la cathédrale Saint-Aubain ou encore au séminaire de Namur.