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25/11/2021
L'histoire de l'abbaye de Floreffe passe aussi par celle de Norbert de Gennep
Le Frère Jean-Baptiste est Prémontré, il fait partie de la communauté de Leffe. Un passionné d'histoire qui nous invite à mieux comprendre la naissance de l'abbaye de Floreffe mais aussi d'un ordre religieux, celui des Prémontrés.
Bonne-Espérance, Saint-Feuillen, Floreffe, Leffe … belle ronde de cervoises désirables aux palais! Ajoutons-y Averbode, Tongerlo, Park, Postel, Grimbergen et vous aurez un fameux palmarès. Qui sait aujourd’hui que derrière ces saints breuvages se cache une réalité hautement spirituelle? Toutes ces vénérables institutions n’existeraient pas sans un certain Norbert de Gennep. Né vers 1080 et mort en 1134, Norbert est parfois désigné sous le nom de ''prince du Nord''. Eh oui un prince, et non un maître-brasseur quoi que, s’il a embrassé, c’est d’abord la foi qui l’a conduit à une réforme spectaculaire. Essayons avant toute chose de décrire le personnage.
Natif de Xanten, Norbert est Allemand par son père et Français par sa mère. Ce jeune prince naît alors que souffle dans l’Eglise un vent de renouveau: la réforme grégorienne. Oui, attention, rien à voir avec le chant grégorien! En 1073, le moine Ildebrando de Soana, devient pape et prend le nom de Grégoire VII. Il entend insuffler dans l’Eglise un profond mouvement de réforme en luttant contre le nicolaïsme (l’absence du célibat des prêtres), la simonie et le trafic des indulgences. Il joue également un rôle capital dans la célèbre Querelle des investitures où l’autorité pontificale est contestée par l’empereur. Cela nous semble bien loin tout cela, et pourtant! En se dégageant de toute cette emprise, le pape n’est plus soumis à l’empereur. S’appuyant sur des ordres nouveaux tels les Cisterciens, les Chartreux ou les Camaldules, Grégoire VII force l’Eglise vers un profond renouveau qui remporte les faveurs des fidèles, eux aussi en attente de réformes tant la société et le clergé lui-même sont gangrenés par le temporel.

Un pèlerin venu de Cologne
Acquis aux idées de cette réforme, le comte de Namur, Henri et son épouse Ermesinde, accueillent en 1121, un bien étrange pèlerin en route vers Cologne, pour y chercher des reliques pour sa future église: Prémontré. Eh oui, Norbert lui aussi a eu vent de cette réforme. Alors que ses parents espéraient le voir bien nanti à la cour de l’empereur comme chapelain, nenni, Norbert renonce à ses privilèges et entame un long chemin de conversion qui le conduira dans toute l’Europe. A Saint-Gilles du Gard, il rencontre le pape Gélase et, plus tard, à Reims, Calixte II. Son souci: se sentir confirmé dans son intuition apostolique par le chef de l’Eglise lui-même. Il désire réunir des prêtres mais aussi des laïcs, hommes et femmes, des familles entières même avec des enfants, menant la vie communautaire, chantant et priant ensemble, prompts à annoncer l’Evangile. Pour ce faire, Norbert choisit la règle de saint Augustin qui s’inspire de la communauté des premiers chrétiens de Jérusalem présentée par saint Luc dans les Actes des Apôtres, célèbre best-seller qui ne faiblit pas. Gageons qu’une telle entreprise ne pouvait qu’attirer des candidats à la vie religieuse. Les disciples de saint Norbert sont alors communément appelés ''chanoines'' du latin canonicus, prêtres ou simples clercs ''suivant une règle''.
Après sa rencontre avec Calixte II, si Norbert est toujours un SDF, un Sans Diocèse Fixe, sa mission d’évangélisation rejoint les aspirations du pape Grégoire VII. A la même période, il se lie d’amitié avec Barthélémy de Jur, évêque de Laon. Les Vitae (biographies) de Norbert nous rapportent qu’un jour, traversant ensemble l’épaisse forêt de Saint-Gobain, Norbert fut soudain convaincu que Dieu lui commandait de se séparer de cet ami pour passer une nuit à prier dans une petite chapelle ruinée dédiée à saint Jean-Baptiste. Le lendemain, Norbert partage son rêve, sa vision: une vallée en forme de croix et des processions de religieux habillés de blanc convergeant vers un lieu où coule une source vive. Aussitôt Barthélémy conduit Norbert en ce lieu paradisiaque: ''En ce lieu-là?, indique Barthélémy en montrant une vaste prairie. Oui, répond Norbert, ce pré que tu montres, ce pré montré!'' Eh bien voilà, chers Lectrices et Lecteurs, l’origine d’un nom et mieux d’un ordre religieux qui cette année célèbre son 900ème anniversaire!

Une halte à Floreffe
Mais comme écrit plus haut, au XIIe siècle, pour construire une église et plus encore un autel pour célébrer la sainte messe, il faut des reliques. Avec ses premiers compagnons dont le fidèle Hugues, natif de Fosses et secrétaire de Barthélémy, Norbert se rend à Cologne pour en quérir. À son retour, il fait halte à Floreffe. Et c’est ainsi qu’il rencontre le comte et la comtesse qui lui offrent, avant même d’avoir pu construire quoi que ce soit à Prémontré, une église et un site d’exception, résidence des comtes de Namur. Cette donation est confirmée le 27 novembre 1121. Elle est suivie de bon nombre de libéralités dont profite la jeune fondation. Puisque les Prémontrés allient vie intérieure, chargée de spiritualité et de travail et vie apostolique, par la prédication itinérante et l’enseignement, très vite, les dons affluent. Les communautés se voient ainsi confier l’administration de nombreuses paroisses. S’inspirant de la carta caritatis (Charte de charité) de saint Bernard, Hugues de Fosses, devenu le bras droit de Norbert, veille à doter la fondation d’une ossature respectant sa spécificité. Norbert quant à lui, infatigable pèlerin, s’en va aux quatre coins d’Europe fonder de nouvelles institutions. En 1126, il est choisi pour devenir archevêque de Magdebourg. Appelé à rétablir la paix entre la papauté et l’empereur dans leur dispute incessante, par son charisme et son aura, il assure à l’Europe naissante une paix fragile mais durable. Rompu au voyage, au jeûne, soucieux de respecter une vie humble et pauvre, il meurt de la malaria et d’épuisement à Magdebourg le 6 juin 1134. L’Ordre compte alors plusieurs centaines de fondations. Après neuf siècles d’histoire ô combien mouvementée, les chanoines réguliers de Prémontré sont présents aux quatre coins de monde. Chez nous, certaines maisons furent restaurées dans les décennies qui suivirent la Révolution française. Si Floreffe devint un collège réputé, Leffe (Dinant) fut à nouveau occupée d’abord par des Prémontrés français (1902) puis néerlandophones (1931). Aujourd’hui cette communauté compte 12 religieux.
L’Ordre ayant toujours répondu ''présent'' aux appels de l’Eglise et de ses pasteurs, nous le trouvons aux quatre coins de l’univers: Australie, Inde, Etats-Unis, Congo, Canada, etc. Si aujourd’hui, et spécialement en Belgique, nos abbayes sont connues pour leur produit brassicole peut-être serez-vous heureux d’apprendre que par-delà ces noms prestigieux comme Grimbergen ou Leffe se cachent de véritables fils de l’Eglise désireux d’annoncer l’Evangile. A la différence de son quasi contemporain, saint Bernard de Clairvaux, Norbert n’a rien écrit. Il nous laisse juste cette superbe devise que tout un chacun pourra faire sienne: ''Prêts à toute œuvre de bien''.
Frère Jean-Baptiste, O. Praem.
Photos: Daniel Mortier
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