''Le chemin continue...'' En quelques mots, Frère Jean-Claude Nikobatuye, 34 ans, parle de sa vie. Un chemin déjà long qui l'a amené du Rwanda en Belgique. Aîné d'une famille de onze enfants, il avait 22 ans lorsqu'il a rejoint le monastère de Gihindamuyaga (Butare). Un monastère bénédictin qui dépend canoniquement de l'abbaye fondatrice de Maredsous. Les liens entre les deux sont donc très importants.
D'une voix posée, Frère Jean-Claude raconte qu'il a d'abord étudié la psychopédagogie dans le but de devenir instituteur. Il enseignera d'ailleurs durant deux années. ''Je ne me sentais pas bien. Une voix intérieure me disait que j'étais appelé à autre chose.'' Cet ''autre chose'', c'était une relation plus profonde avec Dieu. Lors de ses humanités, il avait déjà eu l'occasion de rencontrer des groupes vocationnels, des religieux et des religieuses qui vont à la rencontre des jeunes pour leur parler de la vie consacrée. ''Etre moine, c'est vraiment ce que je cherchais mais il m'aura fallu du temps pour que cela mûrisse en moi. Quand j'en ai parlé avec ma famille, elle m'a simplement dit: 'Tu es adulte. Tu es libre d'orienter ta vie comme tu l'entends.' Je n'oublierai jamais le dernier jour que j'ai passé avec eux. Ils m'ont dit: 'si ça ne va pas, notre porte est grande ouverte'.''

Prie et travaille
Le monastère des Saints-Pierre-et-Paul de Gihindamuyaga est, au Rwanda, un lieu important de spiritualité. Trente frères, tous très jeunes - le plus âgé a 55 ans!- y vivent. Le quotidien? Une vie de prières et de travail comme pour tous les moines bénédictins. Un monastère où l'accueil tient également une place importante. Accueil des personnes qui viennent pour une retraite, un temps de prière, un accompagnement... ''J'avais écrit pour faire part de mon projet. J'ai été invité à visiter les lieux. J'ai rencontré les moines, j'ai pu parler avec eux ...'' Conquis, Frère Jean-Claude a très vite rejoint la communauté et entamé son parcours d'aspirant. ''Même si l'idée de devenir prêtre m'avait déjà traversé l'esprit, je savais qu'un moine n'est pas destiné à la prêtrise. Quand on entre dans un monastère comme celui de Gihindamuyaga c'est pour devenir frère et recevoir une mission déterminée.'' Et puis un jour, le supérieur lui a dit: ''Pour nous, on voit que tu as toutes les conditions requises: si tu veux t'engager.'' Un moment de bonheur pour le jeune aspirant. Intégré dans la communauté, il pouvait poursuivre son chemin. Il est alors passé par le postulat, le noviciat, la profession et enfin la profession solennelle.
Dans de telles communautés, c'est ensemble que les décisions sont prises. Les moines de Gihindamuyaga qui ont besoin d'un prêtre décident de proposer à Frère Jean-Claude de reprendre des cours et de se former à ce ministère. ''On m'a demandé si j'étais d'accord avec cette idée'' souligne le jeune religieux visiblement ravi de cette opportunité qui s'est présentée à lui.
Frère Jean-Claude étudie la philosophie au Rwanda avant de venir en Belgique et plus spécialement à Namur, au Séminaire Notre-Dame pour poursuivre son cursus, en théologie, cette fois. Namur n'est pas très éloignée de l'abbaye de Maredsous où Frère Jean-Claude passe du temps, les vacances notamment. Il retrouve ainsi une vie de communauté avec ses frères bénédictins.

Un climat... particulier
Frère Jean-Claude se souvient très bien de son arrivée en Belgique. Une première pour lui qui n'avait jamais quitté son pays. ''Le climat est particulier'' commente avec beaucoup de diplomatie le futur prêtre. ''Le climat a été pour moi, le premier défi à relever. Lorsque je suis arrivé, il n'y avait pas de neige mais il faisait très froid.'' Et de poursuivre: ''On appelle le Rwanda, le pays des Mille collines. Je suis convaincu qu'il y en a encore plus, elles sont partout. Le pays est pourtant quasi de la taille de la Belgique!'' A peine le temps de s'habituer au froid de l'hiver qu'arrive déjà le printemps puis l'été pas toujours très sec. ''Au Rwanda, l'été c'est trois mois de soleil avec une exception, le 15 août. Il pleut et chez moi on dit que c'est une bénédiction de la Vierge Marie.''
Les découvertes du jeune moine devenu étudiant ne sont pas que liées à la météo! ''J'ai été surpris de voir des églises vides. C'est triste mais je ne suis pas là pour juger. Peut-être que cela viendra aussi chez nous (ndlr: au Rwanda). Il y a encore quelques années, il y avait au Rwanda 100% de catholiques maintenant il y a des musulmans, des protestants.''
Frère Jean-Claude repartira dans son pays d'ici quelques mois, une fois ses cours terminés. ''La décision ne dépend pas de moi. C'est mon supérieur qui me donnera la date et j'obéirai. L'obéissance est fondamentale.'' C'est au Rwanda qu'il sera ordonné.
Depuis qu'il est en Belgique, il n' a pas eu trop de temps pour faire du tourisme. ''Ma mission principale est l'étude'' précise Frère Jean-Claude. ''Lorsque je suis à Maredsous, je vis au rythme de la communauté. Je suis un frère en mission. Et ma mission principale est d'étudier on ne me charge pas plus.''
Lorsqu'il prend un peu de détente, lorsqu'il abandonne ses bouquins pour quelques heures c'est pour faire du sport ou encore du jardinage. Il aime passer aussi un peu de temps à l'atelier de céramique qui fait partie de l'abbaye de Maredsous. ''Je m'occupe surtout du nettoyage des établis une fois que les objets sont démoulés. Je ne suis pas un spécialiste même si un jour, j'ai réussi à faire une croix.''
Le 21 mars, il sera ordonné diacre en vue du presbytérat par Mgr Vancottem en présence de ses frères bénédictins de Maredsous.
Christine Bolinne