Tout se met en place: le costume est réservé, reste à passer le prendre. Ce sera pour vendredi. La hache de sapeur est elle au nettoyage... "Faut que ça blingue" lâche dans un grand éclat de rire le doyen d'Auvelais, l'abbé Philippe Masson. Dimanche 2 mai, il participera à la marche en l'honneur de saint Fiacre. Marcher, c'est pour lui un vrai moment de bonheur. Et pourtant, il a résisté avant de se lancer, avant d'oser!
L'abbé Philippe Masson, après un passage comme vicaire à Philippeville, est nommé curé pour Tarcienne et Gourdinne. Des villages de l'Entre Sambre et Meuse où les marches sont vécues dans une grande ferveur: "On marche pour un saint et avec un saint" explique l'abbé Masson. "La première année, j'ai vécu la marche en habits liturgiques, j'accompagnais la statue du saint. J'étais bien évidemment déjà très heureux. Des participants m'ont demandé pourquoi je ne marchais pas avec eux, en uniforme, cette fois. J'en avais une folle envie. Marcher en uniforme, je savais ce que cela signifie. J'avais 14 ans lorsque j'ai marché pour la première fois et c'était, à Mariembourg, en l'honneur de Notre-Dame de la Brouffe. Une première dans la famille! En même temps il me semblait que cela ne convenait pas à un jeune curé: on boit la petite goutte, on raconte des blagues de caserne! J'étais tiraillé." Un tiraillement proche du supplice quand on sait que le presbytère se trouvait juste en face de la maison où les marcheurs allaient se procurer les tenues...

La fraternité des pelotons
Après de longues hésitations, l'abbé Masson s'est lancé. Il a endossé la tenue de sapeur. Sur son uniforme, il a ajouté l'étole. Pendant la marche, l'abbé a porté le reliquaire (la photo). "Cela m'a plu, un vrai bonheur. On peut tout critiquer des marches mais quand on les vit de l'intérieur, on se rend compte de la fraternité, de l'amitié qu'il y a dans les pelotons. Nous portons tous le même uniforme que l'on soit médecin, échevin, ouvrier ou curé! Tout le monde s'appelle par son prénom. Pour moi, une marche est un lieu de contacts privilégiés avec des gens qui souvent n'en ont rien à faire de la religion. D'autres n'ont plus qu'un contact très lointain avec la foi. Si en participant je peux juste faire comprendre que l'Eglise n'est pas composée que de vieux rabougris qui disent "non" à tout, on aura gagné beaucoup. Mais je ne participe pas à une marche pour faire de l'évangélisation."
Les images se bousculent dans la mémoire de l'abbé Masson. Les sons aussi, il bat la mesure... "Le pas change suivant la musique. Quand on approche d'une chapelle, le pas est particulier, il devient plus lent, plus respectueux. Ce n'est pas celui que nous adoptons lorsque nous sommes en pleine campagne. Je suis toujours particulièrement ému lors de la retraite aux flambeaux: le pas est lourd parce que nos coeurs sont aussi lourds. On sait que la marche se termine. Pendant la retraite aux flambeaux, nous sommes terriblement heureux de ce que nous avons vécu mais c'est fini. Alors très vite, on lance entre nous: 'Ben rate Saint-Fiacre' (ndlr: bien vite Saint-Fiacre)".

La joie du curé
Le doyen d'Auvelais ne raterait pour rien au monde ce retour dans ses anciennes paroisses. Il retrouve la fraternité du peloton mais aussi bien des têtes connues parmi le public. "Quand je célèbre un mariage, j'ai l'habitude de dire au jeune couple: mariage Masson, mariage fécond précise l'abbé. Cela se vérifie très souvent. Lors des marches, les couples en profitent pour venir me présenter leur bébé. Ça c'est vraiment une joie pour le curé".
On l'aura compris, c'est un prêtre comblé qui participe ainsi aux belles pages du folklore de sa région. Aujourd'hui, il est installé à Auvelais. Il a découvert avec le même plaisir, les gilles. Et l'abbé Masson pourrait bien porter, l'année prochaine, à Auvelais, l'habit de gilles. "J'ai déjà rencontré à plusieurs reprises les gilles, ils vivent la même fraternité, la même amitié dans leurs rangs que les marcheurs. Chaque année, à la cavalcade, je les reçois ici au presbytère. Ils m'ont demandé de les rejoindre. Ce qui est sûr c'est que je ne le ferai pas avant de maîtriser les pas. Il y en a une quinzaine de différents. Pour le moment, j'en maîtrise cinq. Là, je reconnais que je manque d'humilité!"
Et à ceux qui critiquent la petite goutte bue entre marcheurs, l'abbé Masson apporte la réponse: "Quand on marche, il y a de la tenue dans les rangs. Lors des pauses, la petite goutte est bien nécessaire. Quand il fait chaud, elle nous désaltère et quand il fait froid, elle nous réchauffe!" Avant d'ajouter: "Pour moi, le folklore est vraiment une occasion unique de vivre avec les gens".
Christine Bolinne

Pour ne rien rater de la marche
1er mai: 13h30, rassemblement de la Compagnie et à 14h, départ de la Compagnie vers Lumsonry
2 mai: 7h30, appel des Marcheurs dans les différents quartiers; 9h, prise du drapeau à l'église; 9h30, messe en l'honneur de saint Fiacre; 11h, départ de la procession accompagnée de la Compagnie et de la Fanfare royale "L'avenir" d'Hanzinne; 12h30, rentrée de la procession; 16h, reprise de la statue de saint Fiacre et départ de la procession vers le cimetière, dépôt de fleurs et décharge au monument; 16h45, départ vers Ahérée; 19h15, rentrée de la procession à l'église suivie du bataillon carré (prairie près de la cure).
3 mai: 8h30, appel des Marcheurs; 10h, messe en l'honneur des Marcheurs; 12h, repas chaud pour tous les Marcheurs; 14h30, départ de la Marche vers les Marais; 20h, rentrée de la Marche au Centre et à 21h30, rentrée aux flambeaux.