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11/6/2020
Il n'y a pas eu que le coronavirus: de 1564 à 1919, le diocèse face aux épidémies et pandémies
Suppression ou report de célébrations, vidange des bénitiers, distanciation entre les fidèles, ce sont là quelques unes des mesures appliquées par l'Eglise face au coronavirus. Une pandémie qui n’est pas la première à avoir frappé, au cours des siècle, le diocèse mais aussi une large partie de notre planète. Retour sur ce passé qui a fait des milliers de victimes.
Ce fut tout d’abord la peste qui vint à plusieurs reprises hanter le diocèse, et plus spécialement entre 1564 et 1669. Et dès cette époque, des mesures furent prises. Ainsi à Namur, une décision communale du 24 août 1596 indique que l’accès aux églises est interdit aux pestiférés. On n’hésita d’ailleurs pas à fermer les églises durant les premiers offices de la journée. De peur que, profitant de la pénombre, des malades ne viennent discrètement prier. Malades qui ne pouvaient, théoriquement, sortir qu’entre 12 et 13h, et munit d’une verge blanche indiquant leur contagion.
En 1605, à la demande des autorités communales, Mgr François Buisseret bénit à Salzinnes, une chapelle et un ermitage, aujourd’hui disparus, dédiés à St Adrien de Nicomédie, martyrisé en 306 et invoqué contre les maux de ventre. A partir de 1630, et jusqu’à une date indéterminée, Mgr Engelbert des Bois présida fréquemment en la cathédrale des messes en l’honneur de St Roch, avec chœurs et violon, et suivies de processions. Et en 1668, des malades continuant d’assister discrètement aux célébrations, décision fut prise: ''ne pas ouvrir les églises avant les sept heures du matin et de les serrer avant les cincque du soir, parce que aulcuns infectés, sous ombre de la brune, venaient dans les églises pour y entendre la messe». Dans ce contexte, le 20 novembre 1668, le Chapitre - de la cathédrale - décida que, pour rappeler quotidiennement cette consigne, le marlier (sonneur de cloche également chargé de la gestion des biens temporels) de la cathédrale ''sonnera le Pinpin pour les dites heures''. Pinpin était le surnom d’une des cloches, aujourd’hui disparue, de l’ancienne cathédrale. L’épidémie prit finalement fin en 1669. La terrible page de la peste était semble-t-il tournée.

Après la peste, la dysentrie
C’est ainsi que l’épidémie qui toucha les Pays-Bas Autrichiens entre août et tout début décembre 1779, frappa le diocèse entre octobre et novembre, et y causa 986 décès, soit près du sixième des 6333 victimes. Des mesures furent imposées par les autorités de Bruxelles: les défunts ne pouvaient être exposés lors des obsèques. Lors des funérailles d’une jeune fille, son corps n'a pu être ainsi porté par ses compagnes, pratique fréquente en zones rurales. On encouragea par ailleurs les prêtres à refuser les inhumations dans les églises, et il leur fallut veiller à l’aération des édifices, dont les portes et les fenêtres devaient dès lors rester ouvertes pendant les offices. Il fut aussi interdit de faire sonner les cloches pour les défunts, et ce pour éviter d’accroître le découragement des malades mais aussi des personnes saines. En mai 1783, lors d’une nouvelle épidémie, on dénombra, rien qu’à Namur, entre 8 et 25 morts par jour. La sinistre page de la dysenterie fut finalement tournée après l’épidémie de 1794. Mais vint bientôt l’heure du choléra.

Venues d'Asie
Sur les 6 pandémies qui eurent lieu entre 1817 et 1923, quatre d’entre-elles frappèrent le diocèse. Ce fut tout d’abord la pandémie partie du Golfe du Bengale en 1826 et qui se répandit ensuite en Asie Centrale, qui fut la 1ère à toucher le diocèse où elle fit 101 victimes en 1832. La suivante, également partie d’Inde, peut-être en 1832, fut signalée à Namur en 1849, étant à l'origine de 220 décès, soit près la moitié des 464 victimes que compta le diocèse. Mais ce fut la troisième pandémie qui fut la plus terrible.
Partie elle-aussi d’Asie en 1863, elle atteignit notre pays en 1866, et y tua plus de 43.000 personnes. Signalée à Namur dans la nuit du 7 au 8 juillet, elle y fera 501 victimes (dont une centaine pour l’ancien Quartier du Grognon, disparu depuis). L’Eglise fut impliquée via des collectes de dons organisées par les curés, tandis que Mgr Victor-Auguste Dechamps, évêque de Namur depuis le 1er octobre 1865, mobilisa les religieuses, y compris celles des congrégations dont la règle ne comportait pas un engagement social ou médical, et les envoya en tous lieux du diocèse. Lui-même fut auprès des malades hospitalisés. Il annula par ailleurs les deux retraites ecclésiastiques ''afin que, dans d’aussi douloureuses circonstances, les ouailles ne soient pas privées du secours de leurs Pasteurs''.

Le 8 septembre, suite à la poursuite de l’épidémie, il indiquait dans un nouveau mandement: ''Je crois devoir permettre de faire gras tous les jours maigres, pendant la durée de l’épidémie régnante, et jusqu’à ce que vous annonciez en chaire que les circonstances qui ont fait accorder cette permission ont disparu. En donnant connaissance de la présente aux fidèles confiés à vos soins ... veuillez aussi profiter de l’occasion pour les exhorter à s’efforcer, par de ferventes prières, par d’abondantes aumônes, par la fréquentation des sacrements et par la pratique de toutes sortes de bonnes œuvres, de désarmer le bras du Seigneur qui s’appesantit sur nous à cause de nos pêchés''. Mesures qui prirent fin le 29 octobre, étant donné que ''Nous avons appris avec bonheur que le choléra a disparu de toutes les paroisses de notre diocèse''. Une dernière épidémie eut lieu en 1893-1894, emportant 63 personnes à Namur. Et c’est 24 ans plus tard, que le diocèse fut frappé par ce qui, jusqu’à cette année 2020, était considéré comme la dernière pandémie ayant frappé nos régions: la grippe espagnole.

La grippe espagnole sème la panique
Apparue officiellement aux États-Unis le 4 mars 1918, mais peut-être en fait déjà présente en Europe dès 1916-1917, elle toucha la Belgique en avril-mai 1918, au départ des zones de combats. Sans doute présente dans le diocèse dès le mois de juillet, c’est surtout semble-t-il à partir du mois d’octobre qu’elle s’y déchaîna. ''Cette grippe sévit partout'' écrivit ainsi le 19 octobre dans ses carnets le chanoine Jean Schmitz, secrétaire de Mgr Heylen. Et d’indiquer également: '' … Cette épidémie a successivement envahi Fleurus, Baulet, Velaine, Gembloux, Grand Leez, Sombreffe, Aische, Meux, Liernu, Saint- Germain, Emines. La panique est telle, dans ces villages, que personne n’ose sortir des maisons. Aux funérailles de M. le Curé , pourtant si vénéré et aimé, il n’y avait pas 150 personnes. Rares sont les paroissiens qui ont osé pénétrer au presbytère. Les prêtres ont dût enlever eux-mêmes le cercueil et le porter …''. ''De partout, les nouvelles les plus alarmantes sur l’extension de la grippe. … '' écrivit-il ensuite le 25 octobre, en signalant également que Mgr Heylen '' envoie une note à lire en chaire dimanche prochain. On profite de toutes les occasions possibles pour faire parvenir la note aux doyens, étant donné que la poste ne fonctionne plus ». Datée du 20 octobre, cette note était en fait un communiqué de la Commission Médicale donnant les consignes à respecter (isoler les malades, s’aliter dès les premiers symptômes, hygiène des mains, …), et que Mgr Heylen demandait aux doyens de bien vouloir transmettre aux curés pour que lecture en soit faite à tous les offices du dimanche 27. Le 2 novembre suivant, dans une directive de sa part cette fois, il demandait à ce que ''(1) A l’occasion de l’épidémie qui règne en ce moment, nous ordonnons que la Messe Votive solennelle pro quacumque necessitante, soit chantée dans toutes les églises du diocèse, dimanche 10 novembre, ou bien le dimanche qui suivra la date à laquelle cette prescription arrivera à connaissance du clergé. (2) … 15 novembre … Messe votive solennelle du Saint Esprit, chantée à la même intention, dans toutes les églises du diocèse. Pour la Ville de Namur, cette messe sera unique et chantée en l’église cathédrale ». Et le 13 novembre, on peut lire : «… S. Hubert, la grippe a fait des ravages extraordinaires. Presque tous les enfants de l’Ecole de Bienfaisance sont morts (plus de 60). Il ne reste en vie qu’une seule Sœur de Charité (sur 4) ».
Encore signalée en avril 1919, la grippe espagnole, ayant ainsi exercé ses ravages, finit cependant par nous quitter, ayant emporté des centaines de diocésains, dont 12 prêtres.
Et un siècle plus tard, face au mal invisible frappant de nouveau notamment le diocèse, l’Église diocésaine est cette fois encore mobilisée. Messes et processions ont certes été suspendues, mais églises, collégiales et cathédrale restent accessibles, permettant ainsi la prière de nombreux fidèles. Internet et la télévision permettant de leur côté de suivre des messes ou des temps de prières enregistrés ou en direct. Et sur le coup de 20h, nombreuses furent les cloches à soutenir elles-aussi le personnel médical.
François-Emmanuel Duchêne
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