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31/3/2020
Michel Libert, le diacre qui écoute... avec le cœur
Michel Libert a bien du mal à rester serein face aux conditions de vie précaires d'hommes et de femmes, de familles qu'il rencontre régulièrement. Des personnes pour qui, un jour, la vie a dérapé. Leur solution: vivre dans un domaine comme Michel Libert appelle pudiquement ces espaces qui ont été longtemps des lieux de vacances avant d'accueillir des caravanes très souvent en mauvais état. Pour tous, le diacre permanent d'Hastière est une oreille attentive mais pas seulement.
Michel Libert a été élevé dans une famille chrétienne. Bien des années plus tard, il continue à accompagner sa maman, le dimanche, à la messe. ''C'était pour lui faire plaisir. La célébration manquait d'allant.'' Le futur diacre n'a pas peur d'ajouter qu'il s'ennuie durant la messe! Tout change avec l'arrivée du chanoine Herbiet et de deux jeunes vicaires particulièrement dynamiques, les abbés Pascal Roger et Georges Bernard. ''A partir de ce moment, je suis revenu à la messe avec enthousiasme, il y avait un nouveau souffle. A la fin de la messe, les prêtres venaient nous parler...'' Petit à petit, la communauté s'agrandit, des projets naissent. Michel Libert propose, lui, de retaper le presbytère. Bâtiment qui accueille, aujourd'hui encore, des salles de réunions et deux appartements qui sont loués. Le tout en bordure de Meuse et à quelques mètres de la superbe abbatiale. ''Hastière a été, poursuit-il, avec Pascal Roger une sorte de paroisse témoin dans ce qui, allait devenir le Chantier Paroissial.'' Michel Libert s'enflamme en parlant de cette période où les fidèles étaient très nombreux aux offices... La nouvelle équipe de prêtres donne du souffle et Michel Libert s'investit toujours plus. Fabienne, son épouse, consacre beaucoup de temps à préparer les enfants à la première communion, à la profession de foi. Très intéressée par la musique, par le chant choral, elle met en place avec les personnes qui vivent au centre de la Croix-Rouge où elle travaille un ensemble qui anime certaines célébrations. Ces deux ''enfants'' d'Hastière y ont fait et continuent à y faire des merveilles.

''Grâce à Fabienne, je suis allé jusqu'au bout''

Un jour l'abbé Roger lui souffle au creux de l'oreille que le diaconat pourrait bien lui convenir. Michel Libert: ''Je savais en quoi consistait le diaconat mais je ne savais pas comment on se formait...'' L'abbé Solot, responsable du diaconat, lui donne tous les renseignements. Fabienne est elle aussi séduite par l'idée. Le couple se lance. Michel Libert se souvient du parcours, pas toujours simple. ''A 50 ans, refaire fonctionner sa mémoire n'est pas évident. Heureusement, Fabienne était très présente, très précieuse. Ce n'était pas toujours facile. C'est grâce à elle que je suis allé jusqu'au bout.'' confie ému le diacre. Et le 25 octobre 2009, Michel Libert est ordonné. Un autre moment d'émotion.
Son ministère, il l'exerce dans son métier, il est peintre en bâtiment. Travailler, Michel Libert sait ce que cela veut dire. Aujourd'hui, Michel Libert a 64 ans. Bien qu'encore très actif, il a passé le relais à son fils, Jérôme. Dans sa voix, une pointe de fierté se devine, lorsqu'il relève que l'entreprise familiale existe depuis 1939! Cadet dans une famille de six enfants, il avait à peine 10 ans lorsqu'il s'est retrouvé, pendant les vacances, sur les chantiers de son père, peintre en bâtiment. ''Avec mes frères, nous n'étions pas obligés mais cela nous plaisait. A 10 ans, j'allais faire les courses. A 12 ans, je détapissais ... Cela me convenait bien. Mes frères et moi, nous aimions beaucoup ces moments.'' Après ses études, Michel enseignera un an l'électricité avant de constater que l'entreprise de peinture lui manquait trop.

Une misère profonde
Michel Libert est aussi conseiller communal à Hastière, sportif avec une passion pour le tennis et le football... Cet homme multi casquettes, a su dégager du temps pour répondre à sa lettre de mission. Outre être diacre dans sa famille, avec ses proches et dans son travail, il est au service des plus démunis. Et le travail est énorme. Sur une population d'un peu plus de 6000 habitants, près d'un millier vivent dans les domaines. Domaine, un mot que Michel Libert, avec beaucoup de pudeur, utilise pour désigner ces nouveaux lieux de vie pour précarisés. Sur le territoire de la commune d'Hastière, il y a 20 domaines. Tous ne sont pas concernés par cette pauvreté. Néanmoins beaucoup accueillent des personnes qui n'ont pas d'autres possibilités que d'y vivre à l'année. Les demandes d'aide sont nombreuses. Michel Libert passe d'un domaine à l'autre. Sa camionnette ne roule jamais longtemps lorsqu'elle sillonne les allées de ces lieux avant d'être stoppée.
Une poignée de main, une accolade, un moment autour d'une tasse de café... Des rencontres qui souvent vont le bouleverser. Aux uns il offrira des bons pour acheter de la nourriture, paiera des médicaments... Des aides multiples financées par l'asbl Solidarité Hastière dont il est l'homme de contact sur le terrain. Il est encore là pour rappeler les aides disponibles... Il a aussi pris, avec ceux qui en font la demande, l'initiative de prier. Comme avec cet homme en fin de vie qui lui avait confié ne croire qu'en Notre-Dame de Beauraing. Ou encore dernièrement cette dame qui cherchait de la nourriture dans les poubelles.
''Il y a une misère profonde'' ponctue le diacre. Avant d'ajouter, réaliste: ''Je me suis déjà fait avoir, je le sais. Je sais aussi qu'il y a des profiteurs. Mais à côté de ça, j'ai déjà vécu tellement de moments forts avec eux.'' Des rencontres, des actes toujours réalisés dans la plus grande discrétion. ''Je suis là pour écouter beaucoup et partager un moment.''conclue-t-il avec beaucoup d'humilité.
Christine Bolinne
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