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11/3/2022
Guerre en Ukraine : deux prêtres namurois se rendent sur place
Mercredi des Cendres, le 2 mars. Le pape François a demandé une journée de jeûne et de prière pour la paix en Ukraine. L’abbé Gianpaolo Cesareo, prêtre à Jambes-Velaine, se demande s’il ne peut pas faire plus que ça… Pourquoi ne pas remplir un véhicule et aller aider sur place ? Avec l’abbé Ireneusz Gosk, il part avec une camionnette remplie de dons… et revient avec une famille ukrainienne.
En ce matin du Mercredi des Cendres, l’abbé Gianpaolo se demande comment venir en aide au peuple ukrainien. Dans son for intérieur, il sent qu’il doit agir. Lors de la prière des laudes, la Parole de Dieu l’éclaire : il faut venir en aide aux opprimés, il faut accueillir la veuve et l’orphelin. Il cherche un confrère pour le suivre dans son aventure. Il appelle l’abbé Ireneusz Gosk, prêtre à Bouillon et d’origine polonaise. Ils contactent leur évêque pour recevoir son accord. Après avoir vérifié si une démarche pareille est bien légale, Mgr Warin les encourage et les bénit. Commence alors une récolte de dons : nourriture, produits d’hygiène corporelle, médicaments, couvertures… En quelques heures, ils ont pu remplir une camionnette prêtée pour l’occasion par le Séminaire de Namur. En route !

Les voilà partis pour la Pologne en début de soirée, mais… avant d’arriver à la frontière belge : panne de moteur ! Ils ne baissent pas les bras et trouvent une grande voiture à Bouillon : après avoir fait un choix parmi les dons reçus, ils embarquent l’essentiel dans la nouvelle voiture et redémarrent. Le duo arrive dans le sud de la Pologne le matin. Ils déposent les dons dans un centre de récolte polonais (qui redistribue ensuite le matériel vers différents centres de réfugiés) ; le centre se trouve dans la maison natale d’Edith Stein (co-patronne de l’Europe).

Deux mystères
Arrivés dans ce centre, ils constatent le drame, le chaos… L’abbé Gianpaolo témoigne : « On voit la tristesse sur le visage des gens : ils ont tout quitté, ils ont peur, leur avenir est inconnu… On voit surtout des mamans avec des enfants, il y a peu d’hommes. Ils n’ont pas beaucoup de matériel : les Ukrainiens ont fui avec peu de choses emballés dans un petit sac ou une petite valise. En quelques jours, leur vie a complètement basculé : ils avaient une vie normale et maintenant, ils sont devenus des réfugiés… Ces personnes sont liées à leur terre ; ils n’auraient jamais quitté leur ville s’il n’y avait pas eu cette guerre. »
Les Ukrainiens qui arrivent dans ce centre polonais sont épuisés par la route et par les émotions : ils mangent, ils se reposent sur des matelas. Quand ils auront repris des forces, ils partiront avec un bus vers d’autres centres, situés plus loin, afin de laisser la place aux suivants. Les deux abbés namurois regardent, observent et prient. « Jésus-Christ aurait aidé ces personnes souffrantes, perdues. On se sentait impuissant face à ce Mystère du Mal. Les réfugiés avaient besoin de couvertures, de nourriture, mais aussi d’une présence, d’une écoute attentive. On a discuté avec eux, ils nous ont montré des photos et des vidéos qu’ils avaient pu faire en Ukraine : des images vraiment dures à voir ! On avait le sentiment de presque rien faire, on était frustrés de ne pas pouvoir faire davantage pour les aider. Et en même temps, au fil des discussions, la vie ressurgissait ; la chaleur humaine, c’est important. Nous avons parlé avec un prêtre franciscain, polonais ; il avait été mandaté pour s’occuper de l’accueil. Ce prêtre était très éprouvé, très fatigué : il se donne corps et âme à sa mission. Dans ce lieu, nous avons pu expérimenter la présence de deux mystères présents sur une frontière : d’abord l’œuvre du mal (la guerre, la division) et ensuite l’œuvre du bien (aider l’autre, soutenir l’opprimé). Le Christ est présent dans les souffrances, Il nous accompagne. Chaque rencontre était très forte. Un moment qui m’a particulièrement touché, c’est quand des bénévoles sont venus apporter des pizzas aux enfants. Les enfants, victimes innocentes de cette guerre absurde, souriaient. »

Sauver Maria, 6 ans
Via un petit réseau social ukrainien, la présence des deux prêtres belges fait parler. On leur demande s’ils pourraient retourner en Belgique avec Maria et son père, Anatoli. La petite fille avait été soignée en Belgique il y a 4 ans pour un cancer du foie. Fuir vers un pays où l’on pourrait faire son suivi médical correctement, rassurerait les parents. Parents qui se sont retrouvés qu’en Belgique ! En effet, le papa avait fui le danger avec sa fille Maria. La maman, Natasha, elle, a dû fuir par un autre chemin, en train. Leur fils aîné, adulte, a dû rester à Kiev. Leur fille ainée, elle, a pu fuir à temps vers les États-Unis. Après des heures de route dans l’autre sens, les deux abbés rejoignent la Belgique. Maria et ses parents sont accueillis chez des paroissiens de Jambes, Roberto et Svitlana, d’origine Ukrainienne.
Svitlana témoigne : « Ils sont arrivés traumatisés chez nous. La petite a beaucoup joué avec notre lapin, comme si c’était une thérapie pour elle. La maman, Natasha, pleure beaucoup : elle craint pour son fils aîné qui est resté là-bas. Je les aide dans certaines démarches ; je traduis. Ils sont très discrets : ils sont gênés, ont peur de faire quelque chose de mal, ne veulent pas déranger… Ils sont très stressés et inquiets pour l’avenir. Ils cherchent aussi à être en contact avec d’autres Ukrainiens qui sont présents en Belgique, pour pouvoir échanger avec eux. Leur ville est bombardée, démolie… C’est très dur pour eux ! De plus, ils se sentent humiliés : ils doivent reconnaître qu’ils sont nécessiteux, qu’ils ont besoin d’aide, ce n’est pas facile quand on veut rester digne. » Natasha, Anatoli et la petite Maria aimeraient retrouver une certaine autonomie, une stabilité, une indépendance : trouver un logement à long terme, trouver un travail, s’intégrer. Ils craignent que le conflit ukrainien ne dure longtemps…

Et maintenant ?
L’abbé Gianpaolo est-il prêt pour un 2e voyage ? « Ce fut une expérience très forte. Poussé par la Parole de Dieu, je me suis lancé dans une initiative personnelle, je voulais me rendre sur place. Mais maintenant, après plusieurs jours, les Polonais sur place commencent à se méfier des initiatives privées. En effet, certains réseaux maffieux profitent de la situation pour mettre en place un trafic d’êtres humains. Ils essaient de sortir les Ukrainiens d’un enfer… pour les amener vers un autre enfer ! C’est vraiment incroyable de profiter ainsi du malheur des gens… Il vaut mieux passer par une organisation reconnue, structurée, comme Caritas par exemple. Ce que je retiens surtout, c’est la générosité des gens : les Belges, les Polonais… L’histoire de la fuite de la famille de la petite Maria, c’est une histoire parmi tant d’autres. »

Appel : Vous souhaitez aider Natasha et Anatoli ? Aidez-les à trouver un « vrai logement » afin qu’ils puissent vivre de manière autonome. N’hésitez pas à leur proposer un emploi. Contact : s.udaltsova@ukr.net

Ci-dessous, retrouvez deux vidéos enregistrées lors de leur périple :
- vidéo 1 : trajet aller
- vidéo 2 : trajet retour

Véronique Joos
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